L’histoire
du Champagne
Une épopée de plus de 300 ans, reflet de l'Histoire de France
Chapitre 1
Les origines
Retournez aux prémices de l'histoire des vins de Champagne, de l’époque gallo-romaine au Moyen Âge
Un territoire historiquement lié au vin
Revenons plusieurs siècles en arrière. Nous sommes au temps des Gaulois. La majorité de la Champagne actuelle est alors peuplée par les Rèmes, un peuple qui a la particularité de s'être rallié à Jules César bien avant que la Gaule ne soit envahie.
Ces amoureux de vin ont pour habitude d'en acheter beaucoup, notamment aux Romains. Un commerce lucratif pour ces derniers qui, après l'invasion de l'ensemble du territoire interdiront aux Gaulois les plantations viticoles, pour se prémunir de toute concurrence. Cet interdit sera levé à la fin du IIIème siècle après Jésus Christ.
Des découvertes récentes ont montré qu'il y a avait de la vigne domestique en Champagne dès le Ier siècle.
Les premières traces témoignant d'une importante activité viticole dans la région champenoise sont liées à l'Église
Dans le Testament de saint Remi, évêque de Reims ayant baptisé Clovis, rédigé au VIème siècle, il est fait mention de plusieurs vignes, dont une dans le faubourg de Reims. L'Église va jouer un rôle moteur dans le développement du vignoble de Champagne. En effet, comme saint Remi, l'archevêque de Reims ainsi que plusieurs abbayes de la région sont des propriétaires viticoles importants. Les méthodes culturales, les savoir-faire de vinification se sont forgés sur leurs domaines.
Pendant plus de 1000 ans,
le vignoble champenois va croître et s'étendre
Dès le Ier siècle, on trouve des traces de vignes domestiques dans la région champenoise. Rapidement, le vignoble va se développer et s’étendre. Il bénéficie d’une situation stratégique sur les grandes routes commerciales. D’abord à travers le développement des foires de Champagne, qui constituent au Moyen Âge le cœur économique de l’Europe. Mais aussi grâce à la position septentrionale du vignoble.
Au-delà de la Champagne, la culture de la vigne devient impossible. La Champagne devient la région d'approvisionnement de tout le nord de l'Europe. Après une période de ralentissement pendant la guerre de Cent Ans, qui dévaste la région, l'essor du vignoble reprend dès la fin du XVème siècle.
Au XVIème siècle, le Parlement de Paris vote un édit interdisant aux cabaretiers parisiens de s'approvisionner dans un rayon inférieur à 90 kilomètres autour de la capitale, pour pallier une baisse de qualité chez les vignerons de la couronne parisienne. Une aubaine pour la Champagne, qui se retrouve juste à la frontière de cette aire !
Chapitre 2
La naissance des vins de Champagne
De 1600 à 1800, prémices des vins de Champagne tels que nous les connaissons aujourd'hui
L'avènement de la Méthode Champenoise
Certains moines comme Dom Pierre Pérignon, moine bénédictin de l'Abbaye d'Hautvillers, ou comme Frère Oudart, de l'abbaye Saint-Pierre-aux-Monts à Pierry, ont joué un rôle déterminant dans l'avènement du Champagne tel qu'on le connait aujourd'hui. À leurs époques, les assemblages de vins se faisaient de manière plus ou moins aléatoire. Dom Pierre Pérignon, en précurseur, voit la complémentarité qui peut exister entre différents vins, différents crus. Il commence alors à pratiquer des assemblages mûrement réfléchis. En résultent des vins plus équilibrés, plus aboutis et de plus grande qualité. Dans la seconde moitié du XVIIème siècle, la Champagne invente une nouvelle technique de pressurage douce et fractionnée : c'est une révolution, qui permet désormais d'obtenir des vins blancs à partir de raisins noirs.
À partir de 1690, on parle de "Vins de Champagne"
D'abord, parce que c'est la première fois que sont mises au point des techniques spécifiques pour élaborer des vins effervescents. Ensuite parce que c'est la première fois qu'un vin est produit dans un territoire donné, la Champagne, et identifié comme tel. Jusqu’au Moyen-Âge on parle de "vin de France", englobant tous les vins de manière générique. À partir de 1690, on évoque spécifiquement les "Vins de Champagne".
La bouteille et le bouchon, outils clés pour l'élaboration du Champagne
En 1685 apparait pour la première fois le bouchon de liège en Champagne. Au XVIIème, l'industrie du verre va petit à petit se transformer et connaître d'importants progrès. Grâce à cela, en 1770, apparaît une nouvelle bouteille de Champagne, en verre beaucoup plus épais et donc beaucoup plus résistante. Ainsi, les bouteilles, qui jusque là ne servaient qu'au service du vin, commencent à être utilisées pour sa conservation.
L'effervescence, qui avait auparavant lieu dans les tonneaux et avait tendance à vite s'échapper, se retrouve ainsi emprisonnée dans le flacon. Ce côté légèrement pétillant plait beaucoup à une certaine aristocratie, qui cherche à se distinguer. Cette consommation de vins de Champagne par les élites contribuera à lui donner son image de vin de luxe.
Chapitre 3
Des vins de Champagne
de plus en plus aboutis
À partir de 1800, nombre d'innovations techniques vont permettre aux Champenois d'améliorer l'élaboration de leurs vins.
Une démarche d'amélioration continue qui se poursuit encore aujourd'hui !
La maîtrise du niveau de sucre nécessaire
à une effervescence optimale
Nombre d'innovations ont permis d'améliorer petit à petit la maîtrise de l'effervescence. Pendant longtemps, elle dépendait en grande partie de la date du tirage. Le résultat était donc quelque peu aléatoire. Bien souvent, les bouteilles explosaient, occasionnant d'importantes pertes. Ou, à l'inverse, l'effervescence ne prenait pas et le vin restait tranquille... À la fin du XVIIIème siècle, les Champenois commencent à ajouter du sucre au tirage, pour compenser un éventuel déficit. Ou au contraire, à utiliser de vieux vins à la quantité de sucre négligeable pour les mélanger à des vins dans lesquels la quantité de sucre serait excessive. Ensuite, au début du XIXème siècle, des "tables de remuage", appelées aujourd'hui pupitres, sont inventées pour amener le dépôt de lies dans le goulot de la bouteille. Il sera par la suite éliminé par le dégorgement.
Les innovations ne s'arrêtent pas
En 1837, un pharmacien châlonnais du nom de Jean-Baptiste François met au point une méthode fiable pour mesurer précisément la quantité de sucre à ajouter au vin pour obtenir une effervescence optimale.
Le taux de casse des bouteilles chute alors drastiquement.
De nombreuses innovations
encore utilisées aujourd'hui
Quelques années plus tard, la plaque de muselet ou capsule, et son maintien par un muselet en fil de fer sont inventés.
C’est seulement en 1860 que Pasteur met en évidence les levures qui transforment le sucre en alcool et en gaz carbonique. Jusque-là, le processus était mystérieux.
Enfin, en 1884, Armand Walfard, gérant d’une maison de Champagne, invente le dégorgement à la glace. Pour ce faire, le col de la bouteille est plongé dans une solution à environ –27° C, formant ainsi un glaçon dans le goulot qui emprisonne les sédiments qui s’y trouvent. À l’ouverture, la pression interne permet d’éjecter le glaçon en perdant un minimum de vin et de pression. Cette technique est encore utilisée aujourd’hui.
Une crise dévastatrice, à l'origine de regroupements des Vignerons et des Maisons de Champagne
Jusqu’à la fin du XIXème siècle, le vignoble champenois était très vaste, couvrant plus de 60 000 hectares. Mais en 1863, le phylloxéra arrive en Europe. Ce puceron attaque les racines de la vigne et en suce la sève, desséchant ainsi le plant qui mourra. La quasi-totalité du vignoble va ainsi se retrouver détruite. Si en Champagne, on privilégie d'abord l'arrachage systématique des plants touchés, rapidement cette crise va amener les vignerons à se rassembler et à se montrer innovants pour surmonter la crise.
En 1898, les Vignerons et Maisons principales, qui possèdent elles aussi des vignes, prennent conscience de l'importance de protéger leur patrimoine commun. Ils fondent l’AVC, l'Association Viticole Champenoise. Elle va s'attacher à reconstituer le vignoble en greffant la vigne champenoise sur un système racinaire (porte-greffe) américain, résistant à l'insecte. Il préserve à la fois les anciennes qualités de ses vins tout en résistant aux sols crayeux de la région et aux maladies.
Chapitre 4
Vers une appellation
de mieux en mieux protégée
Dès le XXème siècle, les Champenois mettent en place de nombreuses actions pour s'assurer de la préservation de leur patrimoine exceptionnel et de son exclusivité
Des règles pour protéger la région et le procédé d'élaboration du Champagne
Conscients de la valeur que représente le Champagne, les Champenois cherchent dès la fin du XIXème siècle à mettre en place des règles prévenant l'usurpation de leur patrimoine. Ils obtiennent en 1887 un arrêt de la Cour d’appel d’Angers reconnaissant la propriété du mot Champagne exclusivement aux vins issus de la Champagne. Ils demandent en 1905 au ministère de l'Agriculture la délimitation de la "Champagne viticole" et l'exclusivité du nom Champagne aux vins "récoltés et manutentionnés complètement dans la Champagne viticole". En 1935, le concept d’appellation d'origine contrôlée (AOC) est créé et l’appellation Champagne est reconnue dès l’année suivante, entérinant l'ensemble des règles que les Champenois se sont imposées.
Un organisme au service de la protection du Champagne
En 1935, est créée la Commission de Châlons. Elle regroupe à la fois les représentants des Maisons et des Vignerons, pour définir collégialement les règles d'élaboration des vins de Champagne. En 1941, est créé le Comité Interprofessionnel du Vin de Champagne, dans le prolongement de la Commission de Châlons. Il concentre encore davantage de pouvoirs pour la défense et la protection des vins de la région.
Un nom convoité et protégé !
Le nom "Champagne", qui renvoie immédiatement à un imaginaire de fête, de luxe, de convivialité et de plaisir, suscite les convoitises. En 1960, un vin mousseux distribué en Grande-Bretagne adopte le nom de "Spanish Champagne". Sa condamnation par la Haute Cour d'Angleterre permet de protéger l'appellation dans les pays de droit anglais et servira de référence pour d'autres pays. Ce combat continu contre toutes sortes de tentatives d'usurpation protège l'appellation Champagne mais aussi le consommateur à qui il apporte une garantie de transparence sur le vin qu’il achète et déguste.
En 2021, la Cour de justice de l’Union européenne renforce encore la protection des appellations d'origine, et notamment l'appellation Champagne, en rendant sa décision contre des bars à tapas appelés "Champanillo". Elle estime dans son arrêt que « la protection des appellations d’origine doit être étendue aux services afin de garantir un niveau de protection élevé ».
Chapitre 5
Un vignoble engagé
pour plus de durabilité
À partir de 1982, la Champagne commence à instaurer des principes de développement durable à l'échelle du vignoble. Une démarche qui se poursuit et s'intensifie depuis
S'engager ensemble pour plus de durabilité
Dès le début des années 1980 et la prise de conscience de l'importance de préserver son terroir, le vignoble champenois entame des démarches visant à améliorer ses pratiques pour les rendre plus respectueuses de l'environnement. Diminution de l'impact sur les sols, réutilisation des déchets, protection du vignoble... Ces actions touchent tous les niveaux de l'élaboration du Champagne.
En 2003, la Champagne est la première région viticole du monde à réaliser son bilan carbone. Suite à cela, un plan d'actions est lancé, composé de cinq axes majeurs : viticulture et œnologie, transports, bâtiments, achats responsables de biens et services et actions transversales. Ces mesures permettront de baisser de 15% son empreinte carbone.
Le vignoble champenois au patrimoine mondial de l'UNESCO
En 2015, les 21 représentants des États-parties à la Convention du patrimoine mondial de l’UNESCO votent à l’unanimité l’inscription des « Coteaux, Maisons et Caves de Champagne » sur la Liste du patrimoine mondial, dans la catégorie des « Paysages culturels évolutifs vivants ». C’est ainsi la valeur universelle exceptionnelle du paysage culturel viticole champenois, de ce terroir unique et plus largement l’ensemble du travail des Champenois qui est reconnu.